Bénin : Maître Renaud Agbodjo, candidat des Démocrates, annonce son retrait de la vie politique après le rejet de sa candidature
Le rideau est tombé sur l’une des séquences politiques les plus inattendues de ces derniers mois. Maître Renaud Agbodjo, avocat au barreau du Bénin et candidat désigné du parti Les Démocrates pour l’élection présidentielle de 2026, a annoncé, ce lundi, son retrait de la vie politique. Une décision qui intervient dans un contexte de forte tension au sein de l’opposition, après le rejet définitif de sa candidature par la Cour constitutionnelle.
Une ascension rapide stoppée net
Désigné en septembre dernier comme candidat du parti Les Démocrates à la succession du président Patrice Talon, Maître Agbodjo incarnait pour beaucoup une nouvelle génération de leadership au sein de l’opposition béninoise.
Son profil — à la fois jeune, rigoureux et profondément attaché à l’État de droit — avait suscité un espoir réel chez les militants du parti dirigé par l’ancien chef de l’État, Thomas Boni Yayi.
Mais cet espoir a vite été contrarié par une série d’obstacles administratifs et politiques.
La Commission Électorale Nationale Autonome (CENA) a d’abord rejeté le dossier de candidature du duo présidentiel formé par Renaud Agbodjo et son colistier, invoquant des irrégularités liées aux parrainages.
Malgré les recours introduits, la Cour constitutionnelle a confirmé, le 26 octobre 2025, la décision de la CENA, écartant définitivement Les Démocrates de la présidentielle.
Un verdict vécu comme un choc
Face à cette issue, le candidat des Démocrates est apparu profondément affecté.
Dans un message sobre et empreint d’émotion, diffusé sur plusieurs chaînes de télévision, il a déclaré :
« Je prends acte de la décision de la Cour constitutionnelle. Après mûre réflexion, j’ai décidé de me retirer de la vie politique béninoise pour un temps. »
Ce retrait, présenté comme temporaire, est motivé, selon ses propos, par un mélange de fatigue morale, de désillusion politique et de désaccords internes au sein même de sa formation.
Maître Agbodjo a évoqué des « dysfonctionnements internes » et des « adversités globales » qui, selon lui, ont contribué à sa disqualification.
« Je préfère prendre du recul, me consacrer à ma famille, à mes proches et à mon cabinet, plutôt que de continuer à servir dans un environnement où la loyauté et la vérité sont parfois les premières victimes », a-t-il ajouté, visiblement ému.
Silences et tensions dans le camp des Démocrates
Du côté du parti Les Démocrates, la réaction officielle reste mesurée.
Aucune déclaration formelle n’a encore été publiée, mais selon plusieurs sources internes, la décision du candidat aurait surpris plus d’un cadre du parti.
Certains y voient une réaction émotionnelle face à l’échec du processus de candidature, tandis que d’autres estiment qu’il s’agit d’une décision réfléchie, voire d’un signal d’alerte sur le fonctionnement interne du parti.
Depuis quelques semaines, des divergences stratégiques sur la gestion des parrainages, la communication interne et le rapport au pouvoir en place auraient alimenté des tensions dans la maison Démocrate.
Le départ temporaire de Renaud Agbodjo pourrait bien être la conséquence directe de ces désaccords non résolus.
Un appel à la paix et à la responsabilité
Dans son allocution, Maître Agbodjo a tenu à rappeler à ses partisans l’importance du calme et de la responsabilité.
Aucun mot de colère, aucune attaque directe n’ont été prononcés contre les institutions.
L’ancien candidat a plutôt appelé à la paix sociale, exhortant ses sympathisants à « respecter les lois de la République » et à éviter toute forme de violence ou de confrontation.
Cette posture, jugée « digne et apaisée » par de nombreux observateurs, tranche avec le ton souvent virulent de certaines figures de l’opposition.
Pour plusieurs analystes, ce geste de retenue confirme le profil d’homme d’État que le jeune avocat commençait à incarner sur la scène nationale.
Entre retrait et repositionnement
Bien qu’il ait parlé de « retrait de la vie politique », Renaud Agbodjo n’a pas fermé définitivement la porte à un retour.
L’expression « pour un temps », soigneusement employée dans son discours, laisse entendre que ce retrait pourrait n’être qu’une parenthèse stratégique, le temps de repenser sa trajectoire et de se reconstruire personnellement.
« Je ne renonce pas à mes convictions. Je crois profondément au Bénin, à la démocratie et à la justice », a-t-il insisté.
Cette déclaration alimente déjà les spéculations : certains y voient le début d’un retrait tactique, d’autres, une rupture définitive avec la classe politique telle qu’elle fonctionne aujourd’hui.
Un vide dans l’opposition
Le départ de Renaud Agbodjo laisse un vide dans le camp de l’opposition.
En l’absence d’un candidat validé par la CENA et la Cour constitutionnelle, le parti Les Démocrates se retrouve sans représentation directe à la présidentielle de 2026, une première depuis la fondation du mouvement.
Cette situation soulève plusieurs interrogations :
- Les tensions internes pourront-elles être surmontées ?
- Et surtout, quelle stratégie adopter face à un pouvoir solidement installé ?
Un tournant pour la vie politique béninoise
Le retrait de Maître Renaud Agbodjo ne se résume pas à une simple décision personnelle.
Il symbolise les difficultés d’une opposition en quête d’organisation, de cohérence et de stratégie dans un paysage politique de plus en plus verrouillé.
Son départ met en lumière les défis structurels qui minent la démocratie béninoise : le poids des parrainages, les divisions internes, et le manque de renouvellement effectif des élites.
En choisissant de se retirer, Renaud Agbodjo tourne une page importante de sa jeune carrière politique.
Mais ce retrait, loin d’être une fin, pourrait être le début d’une réflexion plus profonde sur l’avenir de l’opposition au Bénin.
Reste à savoir si son silence sera celui du renoncement… ou celui d’un homme qui prépare, patiemment, son retour
par Oladélé
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