Nigeria : Tinubu décrète l’état d’urgence sécuritaire national — Un pays au pied du mur

Face à une vague d’attaques meurtrières et d’enlèvements massifs, le président nigérian Bola Ahmed Tinubu a annoncé, mercredi soir, la mise en place d’un “état d’urgence sécuritaire national”. Une décision rare, qui traduit l’ampleur de la crise et la pression croissante sur les autorités fédérales pour protéger les populations.

Novembre 27, 2025 - 19:42
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Nigeria : Tinubu décrète l’état d’urgence sécuritaire national — Un pays au pied du mur

Une spirale de violences devenue incontrôlable

Depuis plusieurs mois, le Nigeria est frappé par une montée spectaculaire de l’insécurité :

  • enlèvements en série dans les États du Nord-Ouest et du Centre,
  • attaques d’écoles et rapts massifs d’élèves,
  • incursions de groupes armés dans des villages,
  • actions renouvelées de bandits, milices communautaires et factions terroristes.

Ces derniers jours encore, des dizaines d’élèves et d’enseignants ont été enlevés dans l’État de Niger, tandis que des communautés entières sont déplacées dans le Zamfara, le Kebbi ou encore le Kaduna. Les forces de sécurité, débordées, peinent à contenir la dispersion et la mobilité des groupes armés opérant dans les vastes forêts du pays.

L’état d’urgence déclaré par le chef de l’État intervient donc dans un climat de peur généralisée, où l’État central est sommé de reprendre le contrôle.

Les mesures annoncées : un tournant sécuritaire majeur

La déclaration présidentielle ne se limite pas à un simple signal politique. Elle s’accompagne d’une série de mesures opérationnelles lourdes :

• Recrutement massif dans les forces de sécurité

Tinubu ordonne le recrutement accéléré de 20 000 policiers supplémentaires, portant à 50 000 le total des nouvelles recrues sur 18 mois. L’armée, la marine et les unités spécialisées devront également renforcer leurs effectifs.

• Redéploiement des forces existantes

Des milliers de policiers actuellement affectés à la protection de personnalités VIP seront retirés de ces services, requalifiés et envoyés dans les zones considérées comme “à très haut risque”.

• Intensification des opérations dans les forêts

Les services de renseignement et les gardes forestiers sont autorisés à mener des opérations avancées dans les forêts où se cachent les bandes criminelles et groupes terroristes, afin de perturber les sanctuaires qui servent de base aux enlèvements.

• Sécurisation renforcée des écoles et lieux de culte

Les institutions religieuses, les internats, les universités et les communautés vulnérables recevront une protection accrue, avec des patrouilles renforcées autour des zones les plus exposées.

Un geste fort, mais aux résultats incertains

La portée de cette décision ne fait pas débat : elle marque une radicalisation assumée de la réponse sécuritaire du gouvernement. Tinubu joue gros. Une dégradation continue de la situation affaiblirait encore davantage la confiance des citoyens dans l’État, dans un pays fragilisé par l’inflation, la crise du naira et les tensions politiques régionales.

Pourtant, plusieurs zones d’ombre demeurent :

• Un défi logistique colossal

Recruter des milliers de policiers ne garantit pas leur efficacité si l’État ne résout pas les problèmes structurels : formation insuffisante, manque d’équipement, coordination défaillante entre armée, police et services de renseignement.

• Des causes profondes encore intactes

Les groupes armés prospèrent dans un terreau fait de pauvreté, d’abandon des zones rurales, de conflits communautaires et de corruption locale. Une réponse strictement militaire risque de ne traiter que la surface du problème.

• Un risque de dérive militariste

L’état d’urgence centralisé doit trouver un équilibre entre sécurité et droits civiques. Les ONG rappellent que les précédents états d’urgence au Nigeria ont parfois conduit à des abus, des arrestations arbitraires ou des restrictions disproportionnées de libertés.

Le pari politique de Tinubu

En prenant cette décision spectaculaire, Bola Ahmed Tinubu veut se montrer comme le président capable de restaurer l’autorité de l’État face à la fragmentation du territoire. Il envoie un message clair à l’opinion publique : l’insécurité est désormais la priorité absolue du gouvernement.

Cette stratégie peut produire un choc positif si elle s’accompagne :

  • d’un meilleur investissement dans le renseignement,
  • d’un dialogue renforcé avec les communautés locales,
  • d’un développement économique des zones rurales oubliées.

À défaut, l’état d’urgence pourrait devenir une mesure lourde mais inefficace, perdue dans le labyrinthe des crises nigérianes.

Un tournant pour le Nigeria

Pour l’heure, le pays retient son souffle.

L’état d’urgence sécuritaire national constitue l’une des décisions les plus audacieuses — et potentiellement les plus risquées — du mandat de Tinubu.

Il engage désormais tout l’État nigérian dans une course contre la montre pour reprendre le contrôle, stabiliser les régions les plus touchées et restaurer la confiance d’une population profondément éprouvée.

Oladélé

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