Le film de la descente aux enfers de Umaro Sissoco Embaló
Bissau, 26 novembre 2025 — En l’espace de trois jours, la Guinée-Bissau a basculé du tumulte électoral à un coup d’État militaire, emportant avec lui le président sortant, Umaro Sissoco Embaló. Ce qui devait être un double scrutin décisif, organisé le 23 novembre, s’est transformé en une chute brutale du chef de l’État, désormais arrêté et remplacé par une junte qui affirme avoir « pris le contrôle total » du pays. Voici le récit d’une semaine électrique qui a précipité Embaló dans le gouffre politique.
Un scrutin né sous tension
Tout commence le 23 novembre 2025. La Guinée-Bissau vote pour élire simultanément son président et son parlement. Le climat est lourd. Le principal parti d’opposition, le PAIGC, a été exclu du processus électoral. Une décision qui a profondément fragilisé la crédibilité du scrutin et éveillé de nombreux soupçons de manipulation politique.
Pourtant, sur le terrain, la journée électorale se déroule dans un calme relatif. Les observateurs de la CEDEAO saluent « un processus ordonné », bien que marqué par une forte polarisation. Dans les quartiers populaires comme dans les centres administratifs, l’attente est palpable : le pays veut connaître son futur destin politique, mais la méfiance règne.
Le duel des vainqueurs proclamés
Dès le lendemain, 24 novembre, avant même la publication du moindre résultat provisoire, les deux principaux candidats passent à l’offensive médiatique.
Umaro Sissoco Embaló, sûr de sa reconduction, revendique la victoire. Face à lui, son adversaire Fernando Dias da Costa affirme également avoir franchi la barre des 50 %, évitant tout second tour.
Deux vainqueurs pour un même scrutin : la crise est scellée.
La commission électorale, elle, reste silencieuse. Elle ne communique aucun chiffre, alimentant une tension déjà explosive. Dans les rues de Bissau, les discussions deviennent plus vives, les cafés ferment plus tôt, et les forces de sécurité multiplient leurs patrouilles. L’atmosphère est celle d’un pays suspendu, à la veille d’un choc.
L’embrasement : la journée du 26 novembre
Le matin du 26 novembre 2025, la situation bascule.
Aux premières heures, des coups de feu retentissent près du siège de la commission électorale. Des tirs nourris claquent ensuite autour du palais présidentiel et du ministère de l’Intérieur. En quelques minutes, la capitale s’embrase.
Des unités militaires lourdement armées prennent position aux points stratégiques : carrefours, administrations, axes menant à l’aéroport. Les communications officielles se taisent. La rumeur court que l’armée a « décidé d’interrompre le chaos ».
À la mi-journée, la nouvelle tombe : Umaro Sissoco Embaló est arrêté dans son bureau du palais présidentiel. Selon plusieurs sources, il n’a opposé aucune résistance. Dans la foulée, sont également interpellés :
- le chef d’état-major,
- le vice-chef d’état-major,
- le ministre de l’Intérieur,
- plusieurs proches collaborateurs.
La machine présidentielle s’effondre d’un bloc.
En fin d’après-midi, une faction de l’armée annonce à la radio nationale avoir « pris la direction du pays jusqu’à nouvel ordre ». Les frontières sont fermées, le processus électoral suspendu, la constitution gelée. La Guinée-Bissau vient de vivre son quatrième coup d’État depuis 1973.
La chute d’un président
Pour Embaló, c’est la fin brutale d’un mandat qui aura constamment oscillé entre ambitions modernisatrices et frictions institutionnelles. Sa présidence, déjà contestée, s’achève dans le fracas des armes, scellant une descente aux enfers en trois actes : un scrutin contesté, une lutte d’annonce prématurée de victoire, puis une mise aux arrêts spectaculaire.
Pour beaucoup de Bissau-Guinéens, cette chute n’est pas une surprise. Elle apparaît comme le résultat d’années d’instabilité politique, de conflits internes entre civils et militaires, et d’une structure étatique trop fragile pour résister à un choc électoral de cette ampleur.
Un pays à reconstruire
L’avenir immédiat reste obscur. La junte promet un retour « prochain » à l’ordre constitutionnel, sans donner de calendrier. Les partisans de Dias da Costa réclament la poursuite du processus électoral. Les organisations internationales appellent au calme et à la restauration rapide de l’État de droit.
Une certitude demeure : la Guinée-Bissau entre dans une nouvelle zone de turbulences. Et pour Umaro Sissoco Embaló, ce mois de novembre marque la fin d’un chapitre politique écrit dans la tension, et clos dans la tempête.
Oladélé
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