Mali : les signaux d’un basculement imminent

Les appels coordonnés des États-Unis, de l’Australie, de l’Italie et de l’Allemagne invitant leurs ressortissants à quitter immédiatement le Mali ne relèvent pas d’une simple mesure de précaution. Ils traduisent une crainte partagée d’un événement grave dans un pays déjà fragilisé par des pénuries, une instabilité sécuritaire persistante et un isolement diplomatique inédit.

Octobre 31, 2025 - 13:06
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Mali : les signaux d’un basculement imminent

Un faisceau d’alertes inhabituelles

Washington a été le premier à donner le ton, appelant ses ressortissants à quitter le Mali « immédiatement » en raison de « risques élevés d’attaques terroristes » et de « pénuries de carburant prolongées ».

Quelques heures plus tard, Canberra, Rome et Berlin ont publié des communiqués similaires, recommandant de quitter le pays sans délai.

Une telle convergence diplomatique n’est jamais anodine : elle indique l’existence de renseignements concordants sur une dégradation rapide de la situation sécuritaire, voire la préparation d’une offensive terroriste ou d’un bouleversement interne.

La crise du carburant : symptôme d’une asphyxie généralisée

Depuis plusieurs semaines, le Mali vit au rythme de files interminables devant les stations-service.

Le carburant, rare et hors de prix, paralyse transports, hôpitaux et production électrique.

Mais au-delà de la pénurie, c’est le fonctionnement même de l’État qui vacille.

L’approvisionnement en pétrole, autrefois assuré via les ports de Côte d’Ivoire et du Sénégal, est désormais compromis par les tensions diplomatiques et la dépendance accrue du pays à des circuits d’importation fragiles.

Les fermetures successives de services publics et les difficultés logistiques des forces de sécurité accentuent le sentiment d’un pays sous tension, au bord de la rupture.

Une équation sécuritaire incontrôlable

Sur le terrain, la situation militaire se dégrade.

Depuis le retrait de la MINUSMA et la montée en puissance de l’alliance Mali–Burkina Faso–Niger (AES), les groupes armés ont regagné du terrain dans le Nord et le Centre du pays.

Les attaques coordonnées contre les garnisons maliennes se multiplient, tandis que les populations civiles fuient des zones redevenues instables.

À Bamako, la défiance s’installe jusque dans les cercles du pouvoir. Des mouvements inhabituels de troupes et des réunions d’urgence observées ces derniers jours alimentent les spéculations sur des dissensions internes au sein de la junte du colonel Assimi Goïta.

Dans un contexte où les équilibres reposent sur la loyauté militaire, toute fracture interne pourrait précipiter le pays dans une nouvelle phase d’incertitude.

L’isolement diplomatique du régime

Sur le plan international, le Mali paie le prix d’un isolement quasi total.

Son retrait de la CEDEAO, son alignement stratégique sur la Russie, et ses tensions ouvertes avec la France et les États-Unis ont réduit ses marges de manœuvre diplomatiques.

Même au sein de l’Alliance des États du Sahel, les fragilités se multiplient : les coups d’État successifs et les difficultés économiques du Niger et du Burkina Faso limitent la portée de cette coopération militaire.

Cette situation laisse le Mali sans réel soutien extérieur en cas d’escalade sécuritaire ou de crise politique interne

Entre effondrement et recomposition

Les diplomaties occidentales redoutent aujourd’hui un scénario à plusieurs inconnues :

  • une attaque terroriste majeure à Bamako ou contre des infrastructures symboliques,
  • un effondrement institutionnel, si les pénuries et la colère populaire débouchent sur des émeutes,
  • ou un réajustement brutal du pouvoir à l’intérieur même de la junte.

Dans tous les cas, les signaux convergent : le Mali entre dans une phase critique, où la conjonction d’une crise économique, d’une guerre larvée et d’un isolement diplomatique peut provoquer une rupture historique.

Un enjeu régional majeur

L’avenir du Mali dépasse ses frontières.

Une déstabilisation à Bamako aurait des répercussions directes sur l’ensemble du Sahel, déjà sous tension.

Les corridors commerciaux, les flux migratoires, la sécurité du Niger et du Burkina Faso — eux-mêmes fragilisés —, mais aussi la stabilité des pays côtiers comme le Bénin et la Côte d’Ivoire, seraient affectés.

À ce stade, la communauté internationale reste silencieuse, tandis que Moscou, allié de circonstance du régime, n’a formulé aucune réaction publique.

Le Mali semble glisser, lentement mais sûrement, vers une zone d’instabilité totale, où la pénurie d’essence n’est que la partie émergée d’une crise plus profonde : celle d’un État isolé, épuisé, et encerclé par les conséquences de ses propres choix politiques.

Si Bamako ne parvient pas à restaurer un minimum de cohésion interne et de crédibilité économique, le pays pourrait devenir le nouvel épicentre d’un effondrement sahélien que personne, cette fois, ne pourra contenir.

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